Oui, je me trouvais forte. Qu'on soit bien d'accord, je suis triste et j'ai le coeur brisé. Mais je me trouvais forte, je me suis mise à fond dans mon boulot, j'ai fait des choses pour moi, j'ai vu des copines, j'ai profité sans me prendre la tête sur les horaires, les piqûres, l'organisation, j'ai repris le sport. La semaine dernière j'étais en formation, j'ai parlé de notre parcours à 1 des collègues avec qui je m'entends bien, moi qui en parle très peu.
Ca, c'était jusqu'à ce week end.
Je suis allée au baptême de la fille de ma meilleure amie, avec mon homme. Elle habite à 2 heures de route de chez nous, et là bas on retrouvait notre autre amie (que nous appellerons Pipelette). Ca fait 15 ans qu'on se connait, la vie nous a éloignées géographiquement mais on reste très proches. On se voit assez régulièrement, avec l'une ou avec l'autre, mais c'est rare qu'on se retrouve "les 3". Et là, c'était la vraie occasion, on avait vraiment hâte de se voir.
Ma meilleure amie est au courant de tout, elle me ramasse quand je suis au 36ème dessous, on s'appelle 1 heure quasi tous les jours, bref, elle suit tout. Et pour une "fertile", elle passe à côté de pas mal de clichés, et c'est rare que ses mots me blessent.
Avec Pipelette (qui a une fille aussi, mais est divorcée et a la garde à mi-temps), on s'appelle beaucoup moins, elle n'était même pas au courant pour la FIV. Parce que oui, j'ai un caractère de merde, et si tu ne me demandes pas de nouvelles je ne t'en donne pas. Et je lui en voulais de ne pas m'en demander. Parce qu'elle n'était pas au courant de la FIV mais elle connaissait nos galères. Et les messages style "coucou, juste pour te dire que je suis en pleine FIV, et que j'ai besoin de soutien", j'y arrive pas. Donc j'appréhendais un peu.
Finalement la joie de se voir a un peu évincé tout ça. On a fait le samedi soir les 6 avec les parents de ma meilleure amie. J'ai senti la tristesse monter doucement, les larmes pas loin de sortir... Je ne sais pas si c'était de les voir ou de les entendre parler de leurs filles respectives, mais il y avait quelque chose. Oui parce que, même sans hormones, mes larmes continuent de monter sans raison, et j'ai l'impression d'être plus émotive qu'avant.
On fait le baptême le Dimanche. Pendant la cérémonie, l'émotion m'a envahie (pourtant je ne suis pas du tout fan des églises et de ce genre de choses, je ne suis jamais allée au cathé et je ne suis même pas baptisée). Mais de voir tous ces couples avec leurs enfants, ma meilleure amie en train de baptiser sa fille de 3 ans, le fait d'être ensemble, le discours du père sur les autres... Et puis c'était quand même la fête des mères.... Je me suis mordue les joues toute la cérémonie.
En sortant, je dis à mon homme que j'avais un gros cafard. Et là, je m'effondre. La peur de ne jamais connaitre le bonheur d'avoir des enfants, nous étions le seul couple sans enfants, le manque quotidien de mes amies les plus proches...
J'ai eu du mal à me calmer, et je ne voulais pas non plus pourrir la fête, heureusement qu'il faisait beau et que j'ai pu sortir mes lunettes de soleil. J'ai géré. Et puis Pipelette est venue vers moi, elle pleurait aussi, et là on s'est effondrées dans les bras l'une de l'autre. Je voyais qu'à l'église elle était à fleur de peau aussi mais je ne savais pas pourquoi. Et là elle me dit que sa fille lui manque, et aussi que ça la rend triste de me voir aussi triste, et que c'est ce qui la fait pleurer. Elle s'en veut aussi beaucoup de ne pas être plus proche, et s'en excuse.
Je me suis rendue compte que j'étais de plus en plus égoiste, et que j'ai du mal à me tourner vers les autres. J'ai vraiment l'impression que j'ai changé depuis le début des traitements, je suis devenue plus triste, égoiste, aigrie, moins empathique avec les autres. Je ris moins qu'avant, je pleure beaucoup plus facilement. Je crois que je suis devenue une personne que je n'aime pas beaucoup... Et ça me rend triste d'être comme ça. Triste de ne pas réussir à me réjouir pour les amis qui vont être parents. Triste d'être jalouse, aussi. Et puis d'avoir l'impression d'être incomprise. Que personne ne mesure l'ampleur de l'espoir, et de la douleur de tout ces traitements. L'impuissance, et l'injustice aussi, que l'on ressent toutes.
Encore aujourd'hui, une annonce de grossesse sur fbook, genre "un mini-nous pousse en ma chérie alors qu'il n'était pas prévu, mais c'est normal parce qu'on s'aime fort bla bla bla" : parce que nous on s'aime pas fort en fait?!, des photos de celles qui sont enceintes... Je crois que je vais me désinscrire, ça m'évitera des gros pincements au coeur et des larmes au milieu de la journée au taf....
C'est un billet tristounet, mais j'avais besoin de vider mon sac.
(J'ai mis presque 1 semaine à le pondre, j'ai un peu de mal à mettre des mots sur tout ça...).
Haut les coeurs, soyons fortes!